Une amie m'a fait remarquer aujourd'hui que j'aurais pu parler aussi, dans le post précédent, du contenu de ma propre "introduction à l'écoute", et ne pas parler uniquement de la conférence de Christophe André. Je prends le commentaire, et note que ce n'est pas la première fois que cela m'arrive...J Alors voici également le contenu de mon intervention à la Maison du Barreau le 8 avril 2016 dans la journée consacrée à l’écoute, et que j'ai faite sous la forme d'un détour par la musique.
L'impact de l'écoute A l'opposé, il y a fort heureusement de jolis bénéfices à aller chercher : L'écoute a une puissance inouïe, qui peut être explorée et apprivoisée au même titre que la puissance de la parole. Les neurosciences démontrent actuellement la production de neurotransmetteurs par le cerveau sous l'effet de certaines musiques et sons : dopamine, endorphines, sérotonine, adrénaline... On peut donc modifier très sensiblement notre humeur, notre rythme cardiaque, notre niveau d'énergie et notre motivation en agissant sur ce que nous écoutons ! Travaux de Robert Zatorre et Anne Blood (Montreal Neurological Institute), Hervé Platel (Inserm), Daniel Levitin (McGill)... S'accorder
La Triple Ecoute Il me semble que 3 niveaux interviennent dans l'écoute d'un musicien, et que le lien peut être fait avec beaucoup d'autres domaines professionnels. Prenons l'exemple d'un violoniste d'orchestre : - en permanence, il est capable de s'écouter lui-même et d'écouter son instrument pour en tirer le son le plus pertinent et harmonieux possible - il écoute également les autres violons, pour que l'ensemble soit cohérent et homogène -et enfin, il écoute le reste de l'orchestre pour comprendre la construction de l’œuvre, le sens de ce qu'il est en train de jouer et dans quoi cela s'inscrit. Et il écoute aussi le public pour capter ce qu'il dégage et percevoir un peu de ce qu'il est venu chercher ce soir-là avec cet orchestre-là. La puissance d'un musicien ou d'un groupe de musiciens dépend en grande partie de la coexistence de ces trois niveaux d'écoutes qui s’enrichissent mutuellement, et de l'ajustement continu entre ce que le musicien écoute et la façon dont il s'y adapte. Il y a des "moments de grâce" qui provoquent ainsi des émotions extrêmement fortes entre les interprètes et leur public. Les ingrédients essentiels de l'écoute Un exercice pour explorer les ingrédients d'une écoute intense : Se plonger dans le souvenir d'un moment où vous vous êtes senti(e) particulièrement bien écouté(e). Vous parliez, et la personne en face de vous écoutait avec une telle intensité que vous vous en souvenez encore aujourd'hui. Plongez-vous dans ce moment, en musique, en vous posant la question suivante : "quels étaient les ingrédients de cette écoute ?" Les ingrédients trouvés collectivement par 350 avocats du Barreau de Paris pendant cette conférence me semblent résumer parfaitement ce qui compose une vraie écoute :
- le Silence - la Présence attentive, complète, sans distraction - l'Attention totale, y compris à ce qui n'est pas dit, aux émotions sous-jacentes et aux besoins - l'Amour, au sens large - l'absence de Jugement Une question en guise de conclusion : "Comment l'intensité de votre écoute pourrait changer votre parole?" Et une citation que j'aime particulièrement, qui nous indique peut-être la marche à suivre pour équilibrer les forces : "Il faut oser d'abord, doser ensuite" Karine Viard
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Ce matin à 9h à la Maison du Barreau, j'ai eu la joie et le privilège de parler d'écoute à 350 avocats venus participer à la "Journée du Bonheur" du Barreau de Paris.
Équilibrer la puissance de l'écoute et la puissance de la parole, explorer les effets des sons sur nos cerveaux et sur notre humeur, ou encore comprendre l'intérêt de s'écouter soi-même autant que l'on écoute les autres.... des thèmes riches et de jolies rencontres ! Et deuxième grande joie, directement liée à la première : pouvoir écouter la conférence de Christophe André, en étant cette fois-ci bien confortablement installée dans un fauteuil de l'auditoire. Ce que je retiens de son intervention très riche, vivante et bien illustrée : > nos cerveaux ne sont pas programmés pour résister aux traitements auxquels ils sont exposés actuellement : pléthore de sollicitations, interruptions fréquentes, multi-tasking, action non-stop. Donc il faut les "muscler" pour les rendre capables de se défendre, un peu comme l'on apprend à se discipliner devant les tentations alimentaires (Recherches basées sur l'expérience des rats de cafétéria). Entre autres par la méditation. > Le bien-être est directement corrélé à l'attention que l'on porte à ce que l'on fait, pendant qu'on le fait. (Etude "A wandering Mind is an unhappy Mind") > Ne rien faire est un magnifique cadeau pour le cerveau, et constitue un nid pour la créativité, l'intuition, la récupération... (Etude "Rest is not Idleness") > Notre cerveau retient beaucoup mieux les émotions négatives que les émotions positives, et a une tendance naturelle à les ressasser. Pour contrebalancer cette programmation de survie, il est utile d'apprendre à ressasser le positif aussi, en se remémorant chaque soir trois éléments agréables de la journée, pour résoudre cette jolie équation "bonheur = bien-être + conscience" MERCI à Karine Mignon-Louvet, à Stéphanie Boyer, à Christophe André, au Barreau de Paris, et à tous les organisateurs et animateurs de cette journée vivifiante !
Or il est difficile de déceler la limite, car elle est par définition individuelle, très variable d'un individu à l'autre, et sans cesse repoussée par le stretching auquel sont soumis les salariés les plus performants, et auxquels ils se soumettent parfois eux-mêmes. Il y a en effet deux désirs qui s'opposent, tant pour l'entreprise que pour le salarié: le souhait de l'équilibre et de l'épanouissement, et le souhait de se dépasser et d'aller au maximum de ses capacités.
Par ailleurs, le burn-out n'est pas un choc brutal et visible : il s'agit plutôt d'un processus long qui s'étale sur plusieurs années, s'installe et se renforce progressivement, et dont le salarié lui-même est rarement conscient. L'allégorie de la grenouille peut illustrer le phénomène : lorsque l'on approche une grenouille d'une casserole d'eau bouillante, elle s'enfuit. Si en revanche on la plonge dans une casserole d'eau froide que l'on pose sur le feu, augmentant progressivement la température, elle s'adapte à son environnement changeant, et lorsque la chaleur devient excessive et qu'elle cherche à fuir, elle n'en a plus la force. Il s'agit donc, pour les salariés comme pour les entreprises, de mettre en place une « veille » de l’épuisement professionnel, à travers des actions de sensibilisation et de prévention, pour éviter qu’il ne se produise ! Car au-delà de l'obligation légale qu'ont les entreprises de prévenir les risques psycho-sociaux, c'est aussi une réelle source d’économies et d’amélioration des performances : il s’agit de diminuer le cynisme et le stress excessifs qui ont des effets néfastes et contagieux sur la motivation, d’augmenter la cohésion et la vigilance mutuelle, et d’accompagner les salariés vers une meilleure gestion de leur équilibre et de leurs énergies! Comment faire, concrètement ? - Pratiquer des auto-évaluations et entretiens, pour mesurer l'éventuel risque d'épuisement professionnel, - Organiser des ateliers thématiques dans l'entreprise, où les salariés viennent échanger idées, réflexions et bonnes pratiques sur un sujet donné, - Proposer des séances de coaching, individuel ou en équipe, aux personnes qui le souhaitent. I grew up with the idea that "improvising" was the best way to fail. I had to work hard and to rehearse several times before every important exam or presentation. And in my professional career, I naturally wanted my presentations and projects to be under control, with "no room for improvisation". At 40, I discovered how to improvise, on my violin first, and then progressively introducing a part of improvisation in the projects I was working on, accepting not to have everything under control, and enriching the experience with unexpected elements: new collaborations, ideas, activities that I would never have imagined. There are probably 3 elements that we could explore in order to improvise "efficiently" J; 1- practising a triple listening: > listening to your own sound, voice, inner state > listening to your co-workers, teammates... > listening to your environment 2- abandoning the willingness to control, while replacing it with the willingness to participate 3- enjoying your ability to dare, learn and create something new and unexpected, and to share it 10 ans de voyages et d'expatriations, de questionnements, de création d'entreprise et de changements professionnels, d'apprentissage de nouvelles langues, de rencontres multiples.... 10 ans pour découvrir enfin ce que "Home" signifie pour moi. "Home" est là où mon énergie peut se renouveler en permanence, sans effort surhumain, "Home" est là où se trouve ma tribu, celle qui m'a reconnue, et que j'ai choisie, "Home" est là où monte en moi cette joie spontanée et sans limite. Il faut parfois partir loin pour trouver sa vraie tribu, tel le Vilain Petit Canard du conte... puis revenir là où l'on est né, avec son vrai plumage et une nouvelle compréhension de ce qui nous entoure et de qui l'on est. Au cours des 10 dernières années, j'ai accompagné en coaching des personnes qui mettaient une telle énergie dans l'adaptation à leur environnement, qu'il ne leur en restait plus beaucoup pour mener à bien des projets auxquels elles tenaient pourtant beaucoup, des personnes qui s'interrogeaient sur leur vraie tribu, après en avoir connu de nombreuses très différentes les unes des autres... En laissant émerger de temps en temps ces questionnements sur notre petite flamme intérieure, sur la joie que l'on aimerait ressentir plus souvent, sur notre tribu de cœur... on prend le risque (ou la chance?) de découvrir un peu plus sa carte intérieure, et qui sait, de découvrir où est notre "Home" ! Contact : Laure Helfgott +33 6 99 68 82 21 laure.helfgott@zenoncoaching.com Yesterday, one of the senior executives of a Spanish company was experiencing the activity of "conducting an orchestra". In front of his colleagues - themselves playing instruments for the first time - he realized how vulnerable he felt. Standing right in front of them, without any expertise in Music, and without knowing exactly what would happen and how, he felt completely vulnerable. And yet, he did a great job, empowering his musicians, listening to them and instantly adapting his leadership! When we asked him what had happened, he told us that it became suddenly all clear for him: this vulnerability was exactly where he could meet his teams and get them involved! Because he didn't know better than them, because he wasn't completely prepared, and because he felt vulnerable, he was able to listen for real, to ask for their support, to collaborate in a much more profound and authentic way than ever before! *Paraphrasing the title of this amazing TED conference by Brene Brown. Last week in Paris, Zenon Coaching had the opportunity to animate a Music & Coaching session for 22 managers from a large company. They have been invited to compose music together, creating 2 original pieces of music, with limited resources and a short time limit. The objective was to better understand and feel the team dynamics when it comes to innovate and invent new concepts from scratch.
What did they get from the activity? DO: "We have to start DOing sooner. Beginning immediately with some tests and prototypes, and then enriching them with new ideas and feedbacks" LISTEN: "We have all the necessary talents and resources we need, just around us. Let's listen to them carefully and let the best ideas and melodies emerge." PLEASURE: "The pleasure is a fantastic indicator of what is a good idea and what is not, as well as a powerful driving force to implement the good ideas. Let's use it more often!" The conclusions and benefits of these Music & Coaching sessions are different for each team and individual, depending on their history, environment, issues, and activities.... What would be your conclusions and benefits? More information: laure.helfgott@zenoncoaching.com par Laure Helfgott
Cette carrière dans une très grande entreprise ne lui était pas exactement prédestinée : Xavier Rouland est issu d’une grande famille de la télévision française et a passé son enfance et son adolescence sur les plateaux télé de Casimir à l’Heure de Vérité en passant par RécréA2 ou encore Le Grand Echiquier, se mouvant dans ce milieu comme un poisson dans l’eau, mais sans avoir réellement l’envie d’y rester.
Après un bac scientifique et passionné de biologie, il commence par un Deug B à Versailles, mais s’aperçoit rapidement que ce n’est pas non plus sa tasse de thé, et débute alors des études d’Economie et Finance Internationale à la Sorbonne. Une longue coopération au Togo lui offre un choc culturel vivifiant : les apprentissages qu’il y fait sont les plus intenses de sa vie, il y comprend que "rien n’est vrai, tout est relatif", et se découvre une passion pour les enrichissements issus des confrontations de cultures et des découvertes de nouvelles frontières. Après un passage dans la Finance chez BNP, et pas très enthousiasmé par le milieu, il se tourne vers EDF qui lui propose d’emblée des responsabilités internationales, d’abord comme chef de cabinet du Directeur International, puis comme Country Manager en Espagne. Lorsqu’il arrive à Madrid en 2008, il y a 50 personnes dans la filiale espagnole et quelques trop rares contrats de clients. Par le biais de rachats de société et d’un joli élan de croissance interne, le nombre de salariés et de contrats est multiplié par 4 en 4 ans, et atteint 220 personnes en 2013. Xavier Rouland constitue une équipe de direction, transforme progressivement la société, fidélise les meilleurs salariés des sociétés rachetées, et structure peu à peu la politique commerciale, la stratégie et les processus de travail de la nouvelle entité. En 2014, l’Espagne impose une grande réforme énergétique qui coûte des milliards d’euros au secteur de l’énergie et porte un coup rude à EDF Espagne, qui se voit contraint de fermer des sites de production et de cogénération et de se séparer de 100 personnes en quelques mois. Aujourd’hui la société compte 120 personnes et se concentre sur le modèle "Efficacité énergétique" développé pendant ces deux dernières années. "Tout est possible" Parmi les éléments qui ont le plus frappé Xavier Rouland pendant ces 7 années espagnoles, il y a la sensation que "tout est possible". Lorsqu’il a démarré en 2009, il n’aurait jamais pu imaginer les expériences qu’il a vécues, que ce soit en nombre, en diversité et en intensité. Il a vécu et touché du doigt le caractère inventif, l’énergie et la capacité d’adaptation de sociétés entières, devenue agiles pour répondre à des contextes incertains et mouvants. Selon lui, les deux éléments les plus saillants dans ce qu’il a perçu du travail en Espagne sont la simplicité des rapports humains et le pragmatisme. Les relations sont simples et directes, à tous les niveaux. Le marqueur du tutoiement crée certes une différence avec la culture française, mais cela ne se limite pas à cet élément. En France, il lui semble que la distance entre deux personnes est proportionnelle à la distance hiérarchique, tandis qu’en Espagne, le rapport peut être sympathique, joyeux et simple, sans apparat ni froideur, et ce quelle que soit la distance hiérarchique. Au premier abord, on peut même facilement avoir l’impression d’être l’ami de son patron. Néanmoins, cette sensation n’a rien à voir avec la chaîne de commande, très respectueuse de la hiérarchie et de la parole du chef. Ce respect des règles lui semble même plus prononcé qu’en France, mais il est dé-corrélé de la distance relationnelle. Anticiper … ou pas Le pragmatisme "presque à l’anglo-saxonne" est un autre élément saillant selon Xavier Rouland. On essaye, puis si cela fonctionne : tant mieux, et si cela ne fonctionne pas, on change de tactique. A l’opposé de ce qu’il avait eu l’occasion de pratiquer en France, renforcé par le syndrome des très grandes entreprises : un nouveau projet y commence le plus souvent par une analyse détaillée dans laquelle toutes les possibilités sont étudiées, puis tous les risques analysés sous tous les angles, avant d’envisager comment parer à tous ces risques… ce qui aboutit rapidement à un rapport très conceptuel, très beau intellectuellement, mais parfois peu opérationnel et teinté d’une forte aversion au risque. Le circuit de décision étant long et compliqué également, il s’écoule souvent plusieurs mois avant que la décision de lancement soit effectivement prise. Or à ce moment, il arrive que les données d’entrée du modèle aient changé, ce qui occasionne de nouvelles boucles d’analyses et une mécanique globale finalement assez anxiogène et compliquée. En Espagne, la démarche semble très différente. L’analyse préalable est réduite à une simple observation des choses telles qu’elles sont, sans plus de recherches. L’idée est émise, et la mise en œuvre démarre. Cela ne fonctionne pas ? On tente autre chose. Ces deux approches sont si différentes que Xavier Rouland se retrouve régulièrement dans une situation de tampon entre ses équipes espagnoles et les équipes centrales en France, à devoir expliquer aux premières pourquoi les secondes demandent autant d’informations, et aux secondes pourquoi les premières n’ont pas estimé nécessaire d’anticiper tout jusqu’au quatrième niveau de risque. En Espagne, le problème est traité lorsqu’il se présente. Pas avant. Et lorsqu’il se présente, la réaction est immédiate, créative et pragmatique. Xavier Rouland résume cette différence de culture par une image : "En Espagne, on prend de l’aspirine lorsqu’on a mal à la tête. En France, on la prend au cas où le mal de tête surviendrait". Le jour où il quittera l’Espagne, Xavier Rouland est convaincu qu’il emportera avec lui ce pragmatisme qu’il apprécie tant. L’expression espagnole la plus étonnante dans la culture du travail en Espagne, selon Xavier Rouland ? "No te preocupes". Lorsqu’il entend ces mots, Xavier Rouland commence à s’inquiéter sérieusement et à regarder plus en détail ce qu’il se passe ! Les 3 conseils qu’il donnerait à un manager français qui arriverait en Espagne le mois prochain ? 1- Observer, observer, observer, et essayer de comprendre 2- Comprendre un point essentiel : ce qui prime avant tout, c’est la relation. On peut arriver avec la meilleure idée du monde ou le meilleur produit du monde, cela n’aura aucun poids si la relation n’est pas établie au préalable. 3- Avoir des partenaires espagnols. Cela permet d’éviter des erreurs de forme, et d’aider justement la création et la consolidation des relations. Propos recueillis pour lepetitjournal.com par Laure Helfgott, coach certifiée HEC Paris et fondatrice de Zenon Coaching www.zenoncoaching.com. Cette interview se place dans le cadre de l'étude qu'elle mène à Madrid, en partenariat avec lepetitjournal.com et La Chambre, sur l'influence de la culture espagnole dans les pratiques managériales des dirigeants français en Espagne. par Laure Helfgott
Après 3 ans dans le sud de la France, il décide d’aller s’installer à Paris où les perspectives dans l’assurance sont plus porteuses, et entre chez CNP Assurances, qui lui propose le poste de Directeur des Grands Comptes des Collectivités Locales (Mairies, OPHLM, Hôpitaux, etc…). Chiffre d’Affaires important, équipe nombreuse, Philippe Baus trouve enfin un poste à la hauteur de sa motivation. Pendant 4 ans, il occupe différentes responsabilités, puis on lui propose de prendre en charge le Développement International. Start-up à l’intérieur du grand groupe, son rôle est d’aller chercher les opportunités à l’étranger, là où CNP Assurances est susceptible de pouvoir se développer dans de bonnes conditions. L’équipe de 6-7 personnes relève ce défi de tête chercheuse, et se plonge dans les analyses de dossiers, les études de marchés, les offres de rachats et les opportunités de développement. Quelques années plus tard arrive le dossier Espagne, à travers le rachat de Skandia Vida en 2006. Philippe Baus saisit alors l’occasion de s’expatrier à Madrid avec sa femme et son fils.
Lorsqu’il arrive en Espagne, le contexte est compliqué : fin de cycle, lendemains de bulles, les belles années de Skandia Vida sont derrière elle, et cette société suédoise très innovante et précurseur dans le secteur de l’assurance en Espagne quand elle s’y était installé dans les années 1980, n’avait pas réussi à se renouveler suffisamment pour faire front à la concurrence de plus en plus forte. Elle comptait 110 salariés en 2007, après en avoir eu 250 dans les meilleures années. Les crises successives l’avaient particulièrement atteinte : en 2008, Lehmann, puis la dette subordonnées, en 2009, la crise immobilière, puis en 2012, la crise de l’Euro, qui viennent s’ajouter à une crise interne à l’Espagne : le taux de chômage beaucoup plus élevé que dans le reste de la zone euro. Et ce dernier point pèse lourd chez CNP Partners, car une gamme de produits repose justement sur une garantie en cas de chômage, occasionnant une montée en flèche de la sinistralité. Philippe Baus arrive dans ce contexte assez morose et incertain, et participe alors aux évolutions et révolutions successives pour transformer Skandia Vida en une filiale rentable de CNP Partners. L’ADN de CNP Partners est notamment son réseau de distribution, constitué non pas de boutiques en propre, mais d’un maillage de partenaires : courtiers, banquiers, agents financiers, "Empresas de Asesoramiento Financiero (EAFI)"… qui distribuent les produits de CNP Parners, et offrent l’avantage d’un bon ratio qualité/prix pour des produits innovants et compétitifs. En l’espace de 8 ans, ce réseau de partenaires a été considérablement bouleversé et développé, partant quasiment de rien, car en 2013 seuls les 2 ou 3 plus gros courtiers espagnols distribuaient les produits CNP Partners, et les caisses d’épargne qui étaient traditionnellement les partenaires les plus importants, disparaissaient les unes après les autres. Désormais, ce sont plus de 60 partenaires pour la zone Est qui travaillent en étroite collaboration avec CNP Partners. La réactivité, qualité bien présente, qu’elle soit conjoncturelle ou structurelle ! En interne, ce changement complet de réseau a occasionné une révolution des systèmes informatiques, des modes de souscription, des polices d’assurance… une révolution profonde et générale de l’entreprise. Or elle s’est effectuée sans blocage, sans difficulté avec les syndicats, sans tension particulière. Philippe Baus se dit impressionné par la capacité qu’on eue les équipes espagnoles à former un groupe homogène et soudé dans son attitude favorable aux changements nécessaires. Il se fait la réflexion qu’en France, cela aurait probablement créé une implosion, tandis qu’en Espagne, le cap a été passé de manière courageuse et souple, avec "99% de transpiration et 1% de génie". Les équipes ont compris que c’était une question de survie, et la direction a compris que ce changement lourd devait impérativement être accompagné d’une communication intense et répétée sur la stratégie et les choix mis en place pour surmonter les obstacles. La taille réduite de CNP Partners en Espagne a aussi facilité ces changements, là où le siège français et ses 3.200 salariés auraient certainement eu plus de mal à encaisser la révolution : "on ne déroute par un paquebot comme un hors-bord", souligne Philippe Baus. Au-delà de la souplesse d’une équipe réduite, il souligne la capacité des équipes espagnoles à impulser les projets et à se rendre disponibles dans l’instant aux urgences qui se présentent, ce qui facilite grandement l’adaptation à des changements perpétuels. La communication en lacets et boucles Un autre élément auquel Philippe Baus s’est adapté au cours de ces 8 dernières années espagnoles est la communication interne à l’entreprise, qui suit une route plus sinueuse et en lacets que celle à laquelle il était habitué en France. Lorsqu’un groupe de salariés est réunit pour la présentation d’un nouveau projet, il y a très peu de réactions, et encore moins de contestations en séance. On ne s’exprime pas de manière frontale comme cela peut se faire dans d’autres pays, car il y a comme un respect des formes et de la hiérarchie qui empêchent les réactions spontanées en réunion. En revanche, les propos se partagent de manière informelle dans un second temps, après la réunion, autour de la machine à café où circulent les "ires et les dires de tout un chacun". Le management a donc tout intérêt à faire ensuite un deuxième passage de communication, one-to-one, pour gérer les retombées et trouver les éventuels aménagements nécessaires. Philippe Baus observe d’ailleurs que l’orsqu’il y a des demandes individuelles, elle sont généralement très constructives, et visent directement à faire avancer les choses. Cet esprit plaît particulièrement à Philippe Baus, lui-même très orienté vers l’action et la construction de solutions concrètes. A cet effet, il s’est construit son propre credo en forme de Triple A : "buena Aptitud, buena Actitud, y buena Accion". Faire ce que l’on dit et le faire bien, en étant le plus cohérent possible. Le fait qu’il soit français dans une entreprise française fondée il y a 150 ans l’aide aussi à asseoir sa crédibilité et sa cohérence vis a vis des courtiers et partenaires, qu’ils soient simples indépendants, ou chefs d’entreprise à la tête de 300 salariés. Il a développé aussi plus de rondeur dans les relations, accordant beaucoup d’attention, d’écoute et de présence à ses interlocuteurs, et enrichissant la relation de tous ces sujets périphériques qui permettent de tisser un vrai lien, plutôt que de se limiter au seul sujet professionnel comme il le faisait habituellement en France. Mais il reconnaît que celle évolution de son style de management est aussi une question de maturité, d’évolution naturelle au fur à mesure que passent les années d’expérience professionnelle, et pas uniquement une question de différence culturelle. L’expression espagnole la plus étonnante dans la culture du travail en Espagne, selon Philippe Baus ? "Por Dios !", qui lui rappelle régulièrement la place de la religion catholique en Espagne, jusque dans la vie professionnelle. Il a d’ailleurs reçu le mois dernier une invitation aux célébrations du Corpus Christi de la part d’un de ses clients, et s’étonne toujours de ce mélange des mondes qui semble si naturel en Espagne et si incongru dans d’autres pays. Les 3 conseils qu’il donnerait à un manager français qui arriverait en Espagne le mois prochain ? - Apprendre l’espagnol, bien entendu - Ne pas hésiter à entrer dans la bulle personnelle, en parlant des loisirs, de la famille, et des sujets éloignés du travail - Expliquer ce que l’on veut et faire ce que l’on dit. Ce B-A-BA du management est toujours apprécié, au même titre que l’exemplarité et le respect de la parole donnée. Philippe Baus estime qu’il faut environ 6 mois pour créer une vraie relation de confiance. Propos recueillis pour lepetitjournal.com par Laure Helfgott, coach certifiée HEC Paris et fondatrice de Zenon Coaching www.zenoncoaching.com. Cette interview se place dans le cadre de l'étude qu'elle mène à Madrid, en partenariat avec lepetitjournal.com et La Chambre, sur l'influence de la culture espagnole dans les pratiques managériales des dirigeants français en Espagne. by Laure Helfgott
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AuthorLaure Helfgott Archives
October 2020
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